1. |
Le crépuscule des idoles
05:51
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Un vent lugubre de fin de règne
Souffle sur nos sociétés mourantes
Qui se convulsent et qui saignent
Dans leurs contorsions décadentes
L'homme cède la place au code-barre
La procréation au clonage
Et un jeune millénaire hagard
Naît dans un puant marécage
Toutes nos croyances les plus fortes
Et tous nos plus profonds symboles
N'étaient-ils que vaines idoles
Déjà tombées et bientôt mortes ?
Le libéralisme à tout prix
Paie celui de sa démesure
Préparant sa propre agonie
Dans sa chute effrénée et sûre
Vache folle, OGM
Ou guerre bactériologique
Ne sont que les prolégomènes
D'une fin apocalyptique
Et nous entrons dans l'âge de glace
Et nous entrons dans l'âge de glace
Que sera le monde de demain
Engendré par ces tristes ruines ?
Ni surhumain ni inhumain
Une ère froide et cristalline
Que George Orwell ou Aldous Huxley
En leurs si justes prophéties
N'auraient pas même imaginé
Dans sa pathétique folie
Un autre symptôme infaillible
Des grands déclins continentaux
Les masses devenues insensibles
Les arts devenus commerciaux
C'est cette noyade culturelle
Cette esthétique de l'insipide
Vénale autant que superficielle
Mêlée à l'attrait du sordide
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2. |
Douche froide
03:40
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Tu rêvais de belles déprimes
À noyer dans des nuits sans fin
Comme dans les vieux polars français
Du début des années 80
De bars glauques un peu enfumés
De plongeons brutaux dans la fange
De filles de nuit pour oublier
Entre deux vodka-orange
Tu rêvais de nuits en bagnole
À fond la caisse sur les périphs
À soigner ton ras-le-bol
En prenant les sorties au pif
À allumer tes blondes sans filtre
À la lumière du tableau de bord
En ouvrant de temps en temps la vitre
Pour balancer ta clope dehors
Et tu te retrouves encore comme un con
Au milieu des boîtes de cachetons
T'avais envie de tourner dans ton film
Et tu tournes seulement en rond
Tu voulais surtout un prétexte
Pour oublier cette vie si terne
Cette saloperie de tous les jours
Qui t'assaillit et qui te cerne
Mais c'est pas si facile que ça
De rayer passé et futur
Tu te rends compte malgré toi
Que la réalité a la dent dure
Qu'il va bien falloir y retourner
Dans cette éternelle débandade
Ça te fait plutôt un sale effet
Comme si tu prenais une douche froide
Tout paraît forcément dégueulasse
Quand on se met à regarder les choses en face
Replonger dans ce monde si crade
Ça te fait l'effet d'une douche froide
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3. |
Psykhouchka
05:33
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Il tourne en rond dans sa cellule
Sous l'œil placide des caméras
Il n'a plus de nom, seulement un matricule
Un lavabo, un lit de camp
Et quatre murs froids
La seule pitance qu'on lui accorde chaque soir
On la lui administre en intraveineuse
Ce sérum acide qui décape sa mémoire
Dissout ses neurones et ses fibres nerveuses
Dissident
Dissident
Condamné à finir ses jours
En hôpital psychiatrique
Dissident
Dissident
Les nuits sans lendemain
D'un prisonnier politique
Ligoté à la table d'opération
Cobaye impuissant hérissé d'électrodes
Il attend la mort comme une libération
Dans ces couloirs blancs
Empestant l'alcool et l'iode
Chaque jour son cerveau se délite un peu plus
Saturé de mixtures expérimentales
Il se sent devenir légume ou incubus
Perdant peu à peu ses capacités mentales
Bourreaux en blouses blanches aux tortures subtiles
Clinique glaciale sans portes ni fenêtres
Exécution capitale qu'à feu doux on distille
Un magma végétal grandissant dans sa tête
Sangles de cuir, aiguilles d'acier
Folie inoculée, démence sur ordonnance
S'efforcer d'obliger son esprit à fonctionner
Quand on le sent s'évanouir
Dans d'atroces souffrances
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4. |
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Troisième nuit dans la bagnole
Embusqué derrière le volant
Avec une bouteille de gnôle
Et un flingue dans la boîte à gants
Surveillant dans ma somnolence
À travers la buée du pare-brise
L'entrée de la résidence
Dans la pénombre indécise
L627 ou Le Choix des Armes
A posteriori j'aurais préféré
Une scène de biture dans un pub
Si j'évite le sang et les larmes
Dans quinze jours on s'arrache cette histoire
Dans tous les vidéoclubs
Foutu blizzard, froid de canard
Pour bien préserver l'atmosphère
De polar tendance série noire
Avec Anconina ou Dewaere
Je recompte mes cartouches
En vidant le thermos de café
Soixante-douze plombes que je découche
À ce compte-là autant assurer
Troisième nuit blanche sur le compteur
Entre les lumières vertes et rouges
Et dans ce vieil immeuble de malheur
Y'a toujours rien qui bouge
Je repasse toujours les mêmes cassettes
Du Motörhead ou du LSD
Si je ressors vivant de cette petite fête
Promis j'arrête de picoler
Faut pas grand-chose ces soirs-là
Pour se faire trouer le bidon
Alors gaffe aux joyeux faux-pas
Ou c'est six bastos pour l'absolution
Un petit manque de sang-froid
Ou mon pétard qui s'enraye
Et je peux faire un croix
Pour de bon sur ma carte vermeil
J'essaie de ne pas voir ma tronche dans le rétro
Depuis que je suis coincé dans cette caisse ça doit pas être jojo
Je vais sans doute décevoir ces dames
Heureusement je risque de rencontrer que des culasses et des lames
Troisième nuit qui enfin s'achève
Dans le brouillard froid de sept heures
Pas mécontent que le jour se lève
Et que je sois encore branché sur le secteur
Foutue migraine, je suis dans le coltar
J'ai la gueule comme un punching-ball
Je débraye direction le plumard
Je suis frais comme un lendemain de picole
Police Python 357
Ces sympathiques débutants
N'ont vraiment plus rien à m'apprendre
Ça a bien plus de gueule en direct
Si on a assez de présence d'esprit
Pour pas se faire descendre
Trois aspirines, un coup de rasoir
Et douze heures de pionce d'affilée
Je fonce vers les boulevards
Complètement déconnecté
Si dans dix minutes je ne suis pas au pieu
Je vais m'écouler dans la caisse
Exit de ce quartier poisseux
Et pleins tubes sur mon deux-pièces
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5. |
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Que de sang a coulé en vain
Dont se sont bâfrés tous ces chiens
Ces fossoyeurs impitoyables
Larbins des flics et des notables
C'est tout le Paris populaire
Qui avait traversé tant de guerres
Que froidement on décapite
À partir de juin 48
Les barricades se levaient
Au son du tambour qui roule
Tandis que quelques vieux croulants ordonnaient
De faire tirer dans la foule
Souviens-toi, Parisien
Souviens-toi jusqu'à la fin
Souviens-toi, Parisien
Souviens-toi des journées de juin
Et Napoléon le petit
Profitant du désordre ambiant
Déclara sauver le pays
En se proclamant prince-président
Les survivants reprirent les armes
Les barricades furent remontées
Et dans un immense vacarme
On lança des assauts désespérés
Vous verrez bien tout à l'heure
Comment on peut mourir
Pour vingt-cinq francs par jour
S'écriait le député Baudin
Juste avant que vienne son tour
Souviens-toi, Parisien
Souviens-toi jusqu'à la fin
Souviens-toi, Parisien
De la mort du député Baudin
Et la sanglante répression
Ne se fit bien sûr pas attendre
Exécution sans sommation
Des insurgés venus se rendre
On fit tirer sur les fenêtres
Fusillade des boulevards
Ordonnant de viser les têtes
De tuer femmes, gosses et vieillards
Bourgeois, soldats, comme artisans
Étudiants, jeunes gens, ouvriers
Furent écrasés dans le sang
Et on massacra les prisonniers
Souviens-toi, Parisien
Souviens-toi jusqu'à la fin
Souviens-toi, Parisien
Du 2 décembre 51
Et puis l'Empire s'effondra
Comme s'effondrent tous les empires
Sedan fut sa Bérézina
La capitulation, son dernier soupir
Le changement se fit en douceur
La IIIe sut prendre le relais
Massacrant avec bon cœur
Quelques trente-cinq mille fédérés
Souviens-toi que les boulevards
Sont rouges du sang des Communards
Souviens-toi, Parisien
Souviens-toi jusqu'à la fin
Souviens-toi, Parisien
Des fusillés du petit matin
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6. |
Dans la tourmente
04:52
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Traîner jour après jour, une errance sans fin
Toujours les mêmes bars, toujours les mêmes coins
Quartiers chauds qui scintillent dans la nuit glaciale
Un îlot de lumière, toute la beauté du mal
Terminus sans appel de vies foutues en l'air
Paradis artificiels aux arrière-goûts d'enfer
Se retrouver encore derrière les mêmes zincs
Permanence nocturne entre quatre et cinq
Dans la tourmente
Dans la tourmente
Traîner soir après soir dans des ruelles désertes
Chercher désespérément une épicerie ouverte
Montagnes d'ordures dans les vieilles arrière-cours
Et au fond du cerveau, comme des coups sourds
Rester toujours branché sur le pilote automatique
Cavaler au hasard dans les quartiers périphériques
Et finalement se retrouver devant le Sacré-Cœur
Comme un moucheron attiré par un projecteur
Dans la tourmente
Dans la tourmente
Pourtant certains matins
Sur le pont de Caulaincourt
Tu regardes sans rien dire
Les premiers rayons du jour
Pourtant certains matins
Encore un peu ivre
Tu te dis qu'après tout
Il faut bien vivre
Avoir complètement perdu la notion du temps
Que cette nuit immense
Qui semble durer depuis vingt ans
Et encore se débattre avec cette sale impression
De se retrouver dans un décor de science-fiction
Des couloirs souterrains
Qui s'enfoncent dans la nuit noire
Leurs murs blancs si froids comme ceux d'un abattoir
Béton dégueulasse, brouillage des sens
Câbles haute-tension, sale odeur d'essence
Dans la tourmente
Dans la tourmente
Oi!
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7. |
Non conforme
04:12
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De la sous-merde de série Z
Sur grand écran, et son dolby
Ça excite bien les minettes
Plus quelques millions d'abrutis
Les foules baveuses se bousculent
Pour aller claquer leur paye
Devant les sourires ridicules
De pouffiasses made in USA
On engloutit sans états d'âme
Les goûts et les sensibilités
Dans une grande mélasse infâme
Uniforme et aseptisée
Quant à tenter d'en placer une
Autant demander la lune
Notre soi-disant culture
N'est plus qu'une fosse commune
Certifié non conforme
Je me plierai jamais à vos normes
Certifié non conforme
Les masses réclament qu'on les endorme
En pleine euphorie libérale
S'agite la danse macabre
Du pathétique carnaval
D'un empire qui se délabre
Et fringués comme des crétins
Entre deux modes et deux tendances
Tous ces moutons restent ravis
De leur lugubre déchéance
Et ces obtus connards rigolent
Ils trouvent tout ça quand même bien drôle
Ils savent pas vraiment pourquoi
Mais tout le charme vient de là
Alors en boucle ils récidivent
Dans leur hystérie collective
À se tordre de rire
À l'idée de tous mourir
Et on applaudit tous en chœur
Dans la joie et la bonne humeur
Devant le si charmant spectacle
Des millénaires en débâcle
Et on lève bien haut son coca
En souriant aux caméras
À l'inébranlable santé
De qui viendra nous enterrer
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8. |
Dur d'être un ange
05:10
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Tu te retrouves seul, comme toutes les nuits
Au fond d'un bistrot de Pigalle
Pour oublier tes insomnies
Et tes humeurs de plus en plus glaciales
De la banquette en skaï défoncé
Tu reluques les macs et les travestis
En alignant les whiskys bien tassés
Les gin-tonics et les kirs cassis
C'est pas de ta faute si la vie fait pas de fleurs
Et après tout c'est pas un drame
C'est dans le sang qu'on lave son honneur
Mais c'est dans l'alcool qu'on lave son âme
Dur d'être un ange
Lumière jaune des soirées solitaires
Dans les recoins cachés de la ville
Là où c'est contre les réverbères
Qu'on monnaye ses idylles
À l'heure des règlements de compte
Quand à la sortie des boîtes de strip
On sent la tension qui monte
Et les lames prêtes à déchirer de la tripe
Toi, tout au fond du bar, tu attends
Une rencontre ou une embrouille
Pour bousculer ce quotidien navrant
Pourtant tu sais que tu rentreras bredouille
Dur d'être un ange
Alors faute de changer ta vie
Tu regardes se perdre celle des autres
Dans les sous-sols de Monoprix
Entre deux deals pas très propres
Ou dans les grands parkings déserts
Où on donne des leçons de décence
À coups de pompes ou de barres de fer
À méditer dans l'ambulance
Toi, tout au fond du bar, tu attends
de jouer toi aussi ton aventure
Mais celles-là, tu le sais pourtant
Finissent toujours au milieu des ordures
Dur d'être un ange
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9. |
Demi-saison
04:11
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Étrange dérive lente et tranquille
Déclin discret entre deux eaux
Marais éteints, pentes faciles
Parmi les massifs de roseaux
Visions brouillées, évanescences
Une léthargie maladive
Les plus mortelles décadences
Sont toujours les plus lascives
Même les immenses nénuphars
Ont à présent l'air malades
Dans cet à-peu-près cauchemar
Tout en nuances maussades
Changer lentement de substance
Virer peu à peu au végétal
Sans chaleur et sans souffrance
Dans l'aigreur d'un vent matinal
Délirer sans discontinuer
Savourer doucement sa fièvre
En se laissant ballotter
Dans ces demi-teintes un peu mièvres
S'abandonner dans ces eaux mortes
Où frissonne un dernier courant
Dont on ne sait trop où il porte
Ni s'il existe vraiment
Perdre encore un peu la raison
S'engourdir sur ces ondes lisses
Dans cette onirique flottaison
Comme un éternel Osiris
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10. |
Aurore Glaciale
06:13
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Après cette si longue nuit, se réveiller enfin
Tant d'années de ténèbres chassées en un matin
Voir se dissiper dans un clair ciel d'hiver
Cette rage sans espoir, cette anxiété amère
Ne plus avoir de comptes à rendre qu'à soi-même
Chasser d'un seul coup les dernières migraines
Se réveiller sans crainte, sans ce tonnerre sourd
Qui ébranle le cerveau à chaque nouveau jour
Une aurore éternelle
Une aurore éternelle
Une aurore éternelle
Une aurore éternelle
Ne plus rien ressentir qu'un apaisement froid
Avoir évité et la peste et le choléra
Se relever enfin dans une aube glaciale
Ne plus s'encombrer ni du bien ni du mal
Ni remords ni rancunes, un oubli sans appel
des années d'aigreur jetées à la poubelle
Ne plus rien attendre, se laisser glisser
Sans appréhension, sans hâte et sans regrets
Se diluer, se dissoudre
Ne plus jamais chercher à en découdre
Calme plat, échos sourds
S'accommoder pour une fois de ce mortel séjour
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Common People Records Barcelona, Spain
Oi!/Punk Label & Mailorder from Barcelona (Spain).
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